• Mes luttes spirituelles : première partie

    Mes luttes spirituelles : première partie

    Le chemin du Seigneur, celui par lequel Il nous conduit, ne finit jamais ; c’est nous qui nous détournons de Lui. Moi aussi, j’ai bifurqué. Les nombreuses préoccupations, le travail épuisant, joints à ma situation de veuvage, vinrent à bout de mon recueillement spirituel. Peu à peu, je me suis éloignée de Dieu. Le continuel effort pour survivre m’occupait l’esprit. Au bout d’une longue lutte, ma vie spirituelle s’était tellement obscurcie que même la force de ma foi se trouvait ébranlée. Cette lutte continuelle pour l’existence faisait que je me demandais à moi-même :

    • « Tu vois que je l’ai toujours dit. Pourquoi avoir une famille nombreuse ? »

    Pendant que je ressassais ces idées, tout ce qui auparavant avait été sacré pour moi et donnait un sens à ma vie, me paraissait sottise, vide. On me renvoyait d’un lieu detravail et je devais aller à la recherche d’un autre ailleurs. Alors la misère devenait encore plus grande et plus forte la tentation.

     

    Mes luttes spirituelles : première partie

     

    L’ennemi malin(Satan) me molestait continuellement :

    • « Pourquoi tu te contes des histoires à toi-même ? Tu sais bien, toi, que tu aurais déjà abandonné la lutte il y a longtemps mais tu ne sais pas quoi dire à tes enfants. Tu ne sais pas comment leur dire tout ce en quoi tu ne crois plus toi-même. Enlève donc ton masque enfin. Tu verras comme tu vas aller mieux. Tes enfants arriveront bien à découvrir ce que tu essaies de leur cacher en ce moment… »

    Alors je m’arrêtais pile et, pendant un moment, s’est présenté devant moi le visage de Dieu, qu’Il avait déjà très ombrageux. C’est ainsi que commença une grande lutte en moi. La lutte a été longue, épouvantable ; ça me tapait sur les nerfs.

     

    J’allais encore à la sainte messe mais c’était pour moi si vide ! Et ça me fatiguait. A l’époque, je faisais deux quarts de travail par jour à la manufacture et même, il m’arrivait de travailler les dimanches. Mes enfants allaient à la messe dominicale le matin, tandis que moi j’y allais en soirée. Ca valait mieux parce que comme ça, ils ne voyaient pas mon manque de recueillement. Au moment de la sainte messe, au lieu de prier, je bâillais d’ennui. Un jour, je décidai de ne plus y aller, je n’irais plus bâiller, que je me disais. Peu à peu, il me semblait que même ma conscience s’y était résignée.

     

    Mes luttes spirituelles : première partie

     

    Un dimanche, je me mis à laver le linge de la semaine. Dans l’avant midi, j’envoyai mes enfants à la sainte messe tandis que moi, je lavai toute la journée. Le soir arriva et mes enfants m’avertirent :

    • « Maman, il est déjà cinq heures et demie ! »

    Je me sentais dérangée par ça et je continuai mon travail. Finalement, un de mes enfants, quelques minutes avant six heures, me dit :

    • « Je t’en prie, dépêche-toi ! »

    Ca m’a secoué et j’y allai. J’y allai mais en cet état, je ne savais pas comment m’adresser à Dieu. Je me surpassais en divagation dans mes pensées :

    • « Que je suis bête ! Pourquoi je garde encore le jeûne du tiers ordre du Carmel ? C’est une pure folie ! Laisse donc tout ça ! »

    Je décidais de ne plus me priver de manger de viande puisque mon alimentation était de si mauvaise qualité. Ce jeûne, je l’ai toujours observé sans aucune difficulté mais seulement par routine.

     

    Quand je revins à la maison, j’ignore moi-même comment m’est tombé dans les mains le petit Psautier de la Très Sainte Vierge. Je l’ouvris et je me mis à prier. Cette prière qui, dans le passé, montait toujours de mon cœur vers Dieu, me semblait maintenant un vain murmure. Je pris dans mes mains mon vieux livre de méditation mais c’est en vain que je m’efforçais : un silence obscur, glacé et muet m’entourait de toutes parts. J’éclatai en sanglots :

    Au milieu de ce grand combat, l’ennemi malin me fit entendre en mon cœur des paroles horribles :

    • « Dieu ne veut plus rien savoir de moi. »

    Une semaine où mon quart de travail commençait le matin, et la semaine suivante où il commençait dans l’après-midi et se terminait très tard, j’éprouvais une grande angoisse intérieure. Il me survenait de telles pensées que les révéler serait blasphémer contre Dieu.

    • « C’est pour ça que j’ai permis ça, pour que tu te persuades que c’est inutile de lutter davantage. »

    La terrible lutte dura environ trois ans jusqu’à ce qu’un jour, ma fille C. me dit :

    • « Maman, dépêche-toi, aujourd’hui à deux heures de l’après-midi, ce sera l’enterrement du docteur B.. »

    Il était déjà une heure de l’après-midi. Ca m’a donné un coup au cœur. Sans y penser davantage, je m’habillai pour ne pas me mettre en retard. Quand j’entrai dans la salle de la veillée mortuaire, j’éclatai en sanglots. Je pensais :

    • « Lui, il est bien maintenant. Il a été un véritable carme (du Tiers Ordre), de vie sainte et exemplaire mais moi ? Est-ce que je me rendrai là, moi ? »
    • « Ne pleure pas. »

    C’était sa voix aimable et douce comme seulement les âmes bienheureuses peuvent faire entendre.

    • « Retourne au Carmel ! »

    Le lendemain, c’était le dimanche 16 juillet, fête de Notre Dame du Carmel, patronne de notre église. J’arrivai tôt le matin et je suis restée jusqu’à la tombée de la nuit. C’est avec beaucoup de difficultés que je me levai pour aller me confesser. Une sécheresse terrible me rongeait l’âme. Je ne ressentais aucun regret dans mon cœur. La pénitence, je la récitais tout à fait mécaniquement tandis que je pensais : tous ces gens sont en train de louer notre Très Sainte Mère mais l’idée ne me vint pas à l’esprit que moi aussi, j’étais en train de la louer. Je ne faisais que penser au frère B. parce que ça procurait un peu de soulagement à mon âme.

    C’est lui qui me poussa à aller vers la Très Sainte Vierge :

    • « Vas-y et incline toi devant Elle ! »

    C’est ce que je fis mais je ne trouvais pas la paix.

    La nuit était déjà bien avancée quand j’arrivais à la maison. Là, j’ai été saisie d’une sensation tellement étrange comme si j’avais laissé mon âme meurtrie et usée au Carmel. Même si ce jour-là je n’avais pas pris une seule bouchée, c’est avec beaucoup de difficultés que je me mis à calmer ma faim.

     

    Mes luttes spirituelles : première partie

     

    Le malin se plaça de nouveau tout près de moi :

    • «  Idiote ! A quoi ça te sert tout ça ? Repose-toi donc. Ne donne pas d’importance à ces choses-là. »

    Avec un poids sur le cœur, je sortis dans le jardin où, dans le silence de la nuit, je commençais à verser des larmes en abondance. A la lumière des étoiles, devant la statue de Notre Dame de Lourdes, que j’avais en notre jardin, je commençais à prier avec grande ferveur.

     

    Le matin suivant, j’allais en hâte à la petite chapelle que je fréquentais en d’autres temps, quand j’étais moi-même encore une jeune maman, et où je m’étais retrouvée tant de fois à la table du Seigneur avec le frère B. Aujourd’hui encore, c’était la sympathie que je ressentais pour lui qui me conduisait là. En chemin, je me retrouvais avec quelques anciennes connaissances qui se rappelaient de moi comme d’une jeune maman exemplaire. Cela me troublait parce que je croyais que le malin voulait maintenant me tenter par la vanité. J’implorais de tout mon cœur :

    • « Ma Mère du Ciel, plus jamais je veux t’être infidèle ! Ne m’abandonne pas ! Mes pas sont si chancelants. »

    Durant la sainte messe, je priais sans cesse le Seigneur Jésus :

    • « Seigneur, pardonne-moi mes péchés. »

    Je n’osais pas m’approcher de la table du Seigneur, même si la personne qui était à mon côté, me prit plus d’une fois par le bras :

    • « Allons-y donc ! »

    Durant ces jours-là, j’ai reçu ces grâces extraordinaires que le Seigneur accorde uniquement à ceux qui sont faibles et convalescents. Une sœur qui était agenouillée à côté de moi, me dit :

    • « Je m’agenouille à côté de vous pour être moi aussi une sainte. »

    Oh, je voyais qu’elle voyait et sentait le seigneur Jésus en moi. Quelques fois, je marchais continuellement les yeux baignés de larmes. L’amour que je ressentais pour le Seigneur Jésus baignait mes yeux de larmes de repentir. Je ne voulais plus voir le monde, je recherchais uniquement le silence pour pouvoir entendre continuellement la voix du Seigneur. Parce qu’à partir de ce moment-là, c’était lui qui me parlait. Oh, ces conversations intimes sont si simples … !

     

    Source : les Editions du Parvis

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